L\'Afrique du futur se dessine dans la créativité digitale - Le cas de la Tunisie

Avec l'émergence d'un nouveau marché globalisé dont les enjeux de diversité ont mis la créativité, l'innovation, la culture au centre de l'économie. L'Afrique mosaïque culturelle avec 54 pays, plus de 3 000 langues et cultures différentes, une population jeune connectée et en pleine expansion, est incomparablement riche et varié, mais ne sait point faire fructifier ses atouts. La contribution du continent aux exportations mondiales de biens culturels est minime tout juste 1,1%, or, les industries créatives digitales (jeu vidéo, 3D, animation, VR, AR, effets spéciaux… etc.) s'avèrent partout dans le monde des leviers de croissance. La promotion de l'industrie créative et culturelle (ICC) contribue non seulement au PIB du pays, mais elle agit également comme un levier pour la création d'emploi et l'inclusion sociale. Rare sont les pays en Afrique a disposé où avoir accompagné la création d'un écosystème créatif culturel digital. Si les gouvernements africains avaient prêté peu d'importance aux ICC, soit en raison du manque de compréhension de leur impact économique ou du fait que leurs administrations et les économies étaient trop faibles pour les soutenir, ils reconnaissent de plus en plus la valeur du développement culturel.Le succès continental des films Nollywood et de la musique Naija au Nigéria a créé « le buzz » et fait émerger une culture mainstream. Véritablesphénomènes ayant suscité un engouement panafricain. Nollywood équivaut à 200 000 emplois directs et à plus d'un million par extension. Quant au chiffre d'affaires, il est estimé à 250 millions de dollars par an. Conscient de ce potentiel symbolique et économique, le gouvernement au travers du projet « Creative Africa » a décidé d'apporter son soutien financier à l'essor de ces secteurs afin d'en faire des industries créatives formelles, contribuant sensiblement au soft power africain et au PIB nigérian. Confirmant la puissance de ses industries créatives avec des sociétés comme Anthill Productions dans l'animation ou Maliyo, Gamsole ou Chopupqui proposent des jeux souvent basés sur la culture africaine, le Nigéria a vu l'implantation d'un bureau de Gameloft.Le Ministre de la Culture du Nigeria a annoncé récemment la volonté de son pays d'investir massivement dans cette nouvelle industrie digitale avec la création de 80 000 emplois dans le jeu vidéo et l'animation.Le gouvernement kenyan a créé en octobre 2014 un fonds spécial pour soutenir le développement de contenu local et la revitalisation de l\'industrie créative. Le pays vise à promouvoir le développement de contenu local afin de créer une industrie du divertissement dynamique et concurrentiel à l\'échelle mondiale, avec le plan Vison 2030. Dans l'animation plusieurs studios commencent à produire des séries mais de qualité variable, Studio Ang, Recon Digital, Apes in Space, Avandu, Pixel Hunters, il existe même une Association des artistes kenyans de l'animation.De même plusieurs écoles forment aux métiers de l'animation et de la 3D, Nairobi Institute of Technology, Homeboyz animation Academy. Dans le jeu vidéo, le studio Black Division Games diffuse Nairobi X en août 2015, et c'est l'un des tout premier jeu africain, ou des Aliens envahissent l'Afrique qui fut téléchargé 21 000 fois en deux mois. Les studios de gaming commencent à faire parler d'eux et notamment, Weza Interactive, Momemtun Core spécialisé dans le développement de jeux à caractère éducatif, ou encore Urban Design Kings, Afrikana Digital.En Côte d'Ivoire et au Sénégal l'industrie du cinéma est plein développement, on ne compte pas moins de 50 sociétés de production cinématographiques en 2015 dans chacun de ces pays, les studios de jeu vidéo sont plutôt rare malgré quelques tentatives au Sénégal avec Caurolis, Galactive, et le récent succès du jeu vidéo Lamb qui ne signifie rien d'autre que la lutte en langue wolof, mais c'est l'animation qui commence à se faire une place avec Obelus au Sénégal et surtout Afrikatoon, Studio 6, Arobase Studio en Côte d'Ivoire. Ces pays ont pris conscience de l'importance de ce secteur et en on fait des priorités nationales, tel le soutien en Côte d'Ivoire au FEJA le plus grand événement eSport et jeu vidéo d'Afrique de l'Ouest, organisé par le jeune studio Paradise Game avec un focus sur l'emploi dans ce secteur.Au Ghana, Leti Arts est certainement le studio de jeu vidéo le plus créatif d'Afrique actuellement, il développe un jeu de super-héros inspiré des légendes et la culture de chaque pays africain. Les missions que doivent relever les joueurs dans leur quête font écho à l\'actualité chaude du continent. Africa\'s Legends Reawakening,s\'ancre dans une réalité qui correspond aux attentes de toute une génération et profite du succès du film Black Panther.L\'Egypte historiquement l'un des leaders en média et production dans le monde arabe et africain, revient progressivement au-devant de la scène, avec la création d'un méga complexe Media Production City équipée de 14 studios hightechs et une zone franche exempté de taxes. Mais toute sa production de dessins animés s'est déplacée au Moyen Orient après sa Révolution, et l'industrie du jeu vidéo commence à voir apparaitre de bons studios tels que AN Games, Appsinnovate, Instinct Games, Funwave Games.L'Afrique du Sud est certainement le pays le plus développée dans cette industrie des ICC digitales, il existe un programme et une volonté affirmée de soutenir les arts visuels dans leur ensemble.Outre le gouvernement sud-africain qui apporte son concours à travers le Conseil National des Arts, des ONG, des Associations, des Fonds contribuent à l'émergence de cet écosystème créatif digital. Toutefois ces studios africains sont focalisés sur le marché intérieur du jeu mobile, et du jeu gratuit surtout pour des thèmes éducatifs et sociaux. Et, ils réalisent souvent des jeux dans un style résolument occidental, comme Celestial Games, Free Lives (créateur de Broforce) ou Tasty Poison.Triggerfish Animation Studios est un studio à la renommée internationale, collabore régulièrement avec Disney, et a sorti en 2013 le film Khumba, long métrage d'animation. Fondé en 2006, Animation South Africa (A.S.A) est l'association qui représente le secteur, avec notamment les studios Gilgamesh Animation, Toon53 Productions, 3DGeek, Luma, Retro Epic, Sea Monster…Le Cameroun a vu émerger des startups de jeux vidéo Kiro'o Games, Noohkema, SDK Games qui font références en Afrique. Et comme le Cameroun,l'écosystème tunisien s'est développé sans aucun soutien ni politique d'accompagnement.C'est autour de 3D Netinfo, l'unique école d'Afrique francophone crée, il a plus de 10 ans par Mme Samia CHELBI que s'est constitué le pôle créatif culturel numérique tunisien. Les métiers de la 3D, animation, jeux vidéo, effets spéciaux, VR, AR, design architectural sont enseignés à 3D Netinfo et elle est devenue rapidement une référence paradoxalement plus connue à l'étranger qu'en Tunisie. L'Ecole a formé plus de 5000 jeunes et reçoit chaque année de nombreux jeunes sub-africains (la startup Noohkema a été incubé chez Netinfo en avant de rentrer au Cameroun), et aucun n'est au chômage preuve s'il en est des besoins des ICC en compétences, et d'un secteur en pleine croissance, que nos gouvernants devraient regardés avec une plus grande attention pour résorber le déficit d'emplois des jeunes. L'Ecole est partenaire des plus grands groupes TIC du secteur que ce soit Autodesk, ou Adobe dont elle est l'un des rares centres de certification, c'est aussi le centre de formation pourOcculus Facebook dans la VR, lançant en mai 2018 avec Google & Occulus le premier Hackaton de la VR africain. En créant CREATEC (l'association des ICC tunisiennes dans le numérique) et le DigiArt Living Lab, seul Living Lab arabe et africain du digital créatif reconnu par le réseau des Living Lab européen ENOLL, Mme CHELBI, et M. ZOGHLAMI ont sensibilisé et promu cette industrie aux travers de nombreuses manifestations, forums dont le dernier en date 3D Talent for Africa rassemblement des acteurs de la 3D africaines pour un état des lieux etl'AfriCup - Sommet des startups africaines.Aujourd'hui si la Tunisie peut rivaliser sans contexte avec l'écosystème Sud-Africain, Kenyan ou Nigérian, elle le doit en grande partie au secteur privé qui s'est développé autour de l'Ecole, et on a vu émerger des acteurs d'importance dans l'animation comme le studio CGS 3D leader du secteur du cinéma d'animation (l'un des plus grands studios d'Afrique et du monde arabe partenaire de Disney) et mais aussi aux studios tels que Freesh Production, Mille & une image (récompensé plusieurs fois dans des concours internationaux), Morbiket, DigitSoft, Pixel One, Piktoo, Voodoo Animation Studio, Unik…De même le pays est très actif, dynamique dans le secteur des jeux vidéo avecDigital Mania (pionnier du secteur et lauréat de nombreux prix internationaux), Prolancers Games, Nuked Cockroach Studios (qui vient de faire une levée de 600 000$) Diginium Graphics a développé des applications pour les consoles PlayStation 3 et Xbox 360 et pour les jeux Diablo et FIFA, MadCat Games, GamePad Tribe, NewGen, Game Vault Studios, Wanagames, Galatech, Creative Insteadsoftware…Le pays peut également compter sur de nombreux acteurs, associations de développeurs de jeu vidéo TAG, TGD, AMAVI et de nombreuses manifestations nationales et internationales pour la promotion du jeu vidéo et de l'e-sport, et notamment le premier Comic Con Africain à Tunis qui a lieu depuis trois ans. Pays touristique par excellence, le Tunisie peut s'enorgueillir d'avoir le premier Musée 3D d'Afrique Magic Eye à Sousse.Par ailleurs, le Ministre des Affaires culturelles et le Centre National du Cinéma et de l'Image, afin de soutenir le secteur du jeu vidéo ont créé le\"Créative Digital Lab\" et le \"Gaming Lab\" et semble prendre conscience de l'importance de cette industrie des ICC et va organiser en septembre 2019, le premier salon international du e-games, le Carthage Games Festival. Outre l'animation & le jeu vidéo, cet écosystème s'est développé également autour de la 3D (CubicProd, InHatt, Bird Studio, Eminence, VoxlArt, l'Alchimiste, NG Multimédia, Smart Frame Prod) des effets spéciaux (Stellar VFX, Cube 3D Tech), des hologrammes, mapping (Design Lab, Mirage Holograms, Peaksource), de la VR (New Technologies, The BoxVR, SoWhen, Incept) créant un pôle complémentaire et attractif, permettant à de nombreux studios étrangers de s'installer en Tunisie, Decod 3D, 3D Matchmovers, Voxels Imagerie, 3D Prime, SandStorm, Bizao, Lighting Studio, Onearchitecture SaphirProd(partenaire de Nvidia et de HTC Vive pour l'Afrique francophone).La Tunisie est également un pôle majeur en offshoring, on compte au moins une cinquantaine de studios, agences, dans le design architectural 3D ( Créalis, Les Fées WOW, Magheb3D, Hypn-Oze, Archiring Studio, 3Dianthus studio, Design 3D … ) et dans le marketing digital 3D (New Technologies, Innov8, Artworks Production, Octopus Design, Beirdo Studio… )L'approche numérique immersive ou interactive sera au cœur de l'industrie du futur, tous les secteurs seront touchés, le commerce, la banque, le tourisme la finance, la médecine, les loisirs…comme le simple consommateur en seront les bénéficiaires. La3D est au cœur du contenu et des services numériques d'aujourd'hui, animation, jeu vidéo, effets spéciaux, VR, design architectural et produire de l'innovation, de la création, avec l\'apparition de toutes nouvelles technologies 3D, de rupture, ne s'improvise pas, il faut avoir une vision, une stratégie, un cadre afin de se préparer à ces mutations technologiques liées au ICC numériques.C'est ce que l'Association CREATEC et ses membres, le DigiArt Living Lab et 3D Netinfo ont mis en place depuis quelques années déjà, pour répondre à ces nouveaux métiers d'avenir, à cet univers numérique immersif qui passionne les jeunes, à anticiper sur les besoins futurs, mettre en place une politique de formation spécifique afin de ne pas rater l'industrie 4.0. Et grâce à ces professionnels de l'ombre, les compétences et l'expertise tunisiennes commencent à être reconnues, et appréciées 3D Netinfo est sollicitée au Sénégal, au Togo, au Cameroun, par des incubateurs africains afin d'apporter le savoir-faire et la formation en 3D.D'autant que l'Africup – Sommet des startups africaines à mis en valeur les ICC tunisiennes permettant la signature de nombreux projets de partenariats africainsM. Mohamed ZOGHLAMI (Article paru dans CIO Mag de décembre 2018)

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